Un embryon sans défaut créé avec trois parents

Une nouvelle technique controversée combinant l'ADN de trois personnes pour créer un embryon sans défaut génétique est soumise à l'Agence américaine des médicaments.

 

Un comité consultatif d'experts était entendu mercredi par l'Agence américaine des médicaments (FDA) sur une nouvelle technique controversée combinant l'ADN de trois personnes pour créer un embryon sans défaut génétique responsable de certaines maladies héréditaires incurables.

Le comité, réuni depuis mardi, devait faire des recommandations mercredi en fin de journée à la FDA (Food and Drug Administration) sur la sûreté de cette procédure pour des essais cliniques. Jusque-là, cette technique n'a été expérimentée que sur des singes.

Les questions éthiques subsistent

Toutefois, ces experts ne se prononceront pas sur les questions éthiques que cette technique peut soulever. Ses détracteurs l'assimilent à des manipulations génétiques destinées à concevoir des bébés sur-mesure.

Les scientifiques font valoir que cette technique, appelée «fécondation in vitro avec trois parents», devrait être autorisée pour des essais cliniques car elle a un énorme potentiel médical, tout comme la recherche sur les cellules souches embryonnaires et le clonage.

Remplacer la mitochondrie défectueuse

Cette consiste à retirer de l'ovule de la mère la mitochondrie, c'est à dire le générateur d'énergie des cellules, qui est défectueuse pour la remplacer par une mitochondrie saine provenant d'une autre femme. Après avoir été fécondé par le sperme du père en laboratoire, l'ovule est implanté dans la mère et la grossesse peut alors se dérouler normalement.

Cette procédure a été inventée par Shoukhrat Mitalipov, un chercheur à l'Université des sciences et de la santé d'Oregon (nord-ouest), qui a réussi à faire naître cinq singes en parfaite santé et propose désormais d'utiliser cette technique chez des humains dans des essais cliniques.

Anomalies génétiques transmises par la mère

Chaque année, de 1000 à 4000 enfants qui naissent aux États-Unis développent une maladie mitochondriale, pour la plupart avant l'âge de dix ans. Ces pathologies sont variées et peuvent toucher le système nerveux central, provoquer la cécité ou des problèmes cardiaques.

Les maladies de la mitochondrie l'empêchent de convertir les nutriments alimentaires en énergie et résultent souvent d'anomalies génétiques provoquées par des mutations dans l'ADN mitochondrial transmis par la mère.

Des techniques similaires existent déjà

Des scientifiques aux États-Unis ont déjà fait des expériences de fécondation réussies combinant des matériaux génétiques provenant de trois personnes, mais selon une technique différente.

En 2001, des chercheurs dans le New Jersey (nord-est) ont ainsi utilisé des tissus du cytoplasme, l'enveloppe entourant le noyau de l'ovule chez une femme fertile. Ils l'ont ensuite implanté après la fécondation dans l'ovule d'une femme infertile.

Près de vingt enfants ont été conçus de cette manière aux États-Unis. Mais cette procédure a soulevé de nombreuses questions et a conduit la FDA à demander aux scientifiques de cesser d'y recourir chez les humains sans une autorisation spéciale préalable.

«Cette procédure «soulève de sérieuses questions»

Concernant la nouvelle technique sur laquelle se penche la FDA, le «Center for Genetics and Society», un organisme de Washington qui y est opposé et a organisé une pétition contre son autorisation, estime que cette procédure «soulève de sérieuses questions de sûreté et d'éthique pour la société».

«Il s'agit d'une procédure biologiquement extrême qui pose un risque pour tout enfant conçu de cette manière et qui remet en question un consensus international de longue date contre la conception d'humains fabriqués génétiquement», juge dans un communiqué Marcy Darnovsky, directrice de cet organisme.

Le débat fait rage

«Cette technique comporte un nombre étendu de risques prévisibles et imprévisibles pour tout enfant né de cette manière, ainsi que pour les générations futures. Elle pourrait ouvrir la voie à d'autres manipulations génétiques des cellules germinales», selon elle.

Quelque 40 pays, dont un grand nombre avec des secteurs de biotechnologie et biomédicaux très avancés, ont adopté des lois interdisant de telles modifications génétiques, souligne Marcy Darnovsky. Rejetant ces craintes, Susan Solomon, PDG de la New York Stem Cell Foundation, estime que «la recherche ne devrait pas être motivée par la peur de l'inconnu».

«Il n'est pas question de bébés fabriqués génétiquement, nous essayons seulement d'empêcher des maladies horribles», a-t-elle dit au Washington Post. La FDA n'est pas tenue d'adopter les recommandations des comités d'experts qu'elle consulte, même si elle les entérine le plus souvent.

 

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Source(s) : tdg.ch / AFP / Newsnet, le 26.02.2014

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